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13 mai 2025

Entretien avec Giuseppe Antonelli, directeur du Multi (Musée multimédia de la langue italienne)

Auteur: Paolo Grossi

Entretien avec Giuseppe Antonelli,  directeur du Multi (Musée multimédia de la langue italienne)

newitalianbooks et le Multi (Musée multimédia de la langue italienne) entament cette année une collaboration basée sur l’objectif commun de promouvoir et de diffuser la langue italienne auprès d’un public international. Nous avons demandé à Giuseppe Antonelli, professeur d’histoire de la langue italienne à l’Université de Pavie et directeur du Multi, d’expliquer aux lecteurs de newitalianbooks les objectifs et les caractéristiques de ce musée numérique.

 

Le Multi (Musée multimédia de la langue italienne, disponible à l’adresse https://multi.unipv.it/it/) réunit dans son nom deux termes apparemment éloignés l’un de l’autre : musée, un mot qui fait penser à un lieu de conservation d’objets anciens, appartenant à d’autres époques, et multimédia, qui renvoie plutôt à ce qui est le plus actuel et contemporain. Le Multi est-il donc né pour conserver le passé ou pour documenter le présent de la langue italienne ?

 

Pour répondre à cette question, je pars de ce qui s’est passé en octobre de l’année dernière, lorsque le Multi a été exposé dans le pavillon italien lors de la Foire du livre de Francfort avec trois grands écrans interactifs et autant de postes audio, en plus de la possibilité de télécharger les différents parcours via un QR code. En raison de sa conception spécifique, qui trouve un équilibre entre la tradition millénaire de notre magnifique langue et la narration technologique la plus avancée, le Multi a été considéré par le ministère de la Culture comme une excellente déclinaison du slogan choisi pour l’Italie, invitée d’honneur de cette manifestation : « Racines dans le futur ».

Le Multi, qui fait aujourd’hui partie du Système muséal de l’Université de Pavie, est le fruit d’un travail de conception mené par trois unités de recherche distinctes – l’Université de Naples « L’Orientale », l’Université de Tuscia (Viterbe) et l’Université de Pavie – sur une infrastructure informatique conçue par le studio Dotdotdot de Milan. Structuré comme une plateforme inédite de connaissances et de recherche, le Multi se propose de raconter, préserver et contextualiser l’extraordinaire patrimoine culturel constitué par la langue italienne, en la faisant émerger comme une « chose vivante », un outil d’expression et de croissance de la société. Un musée conçu pour satisfaire, et en même temps susciter, la curiosité envers notre langue. D’où l’idée de structurer le récit en répondant à une série de questions. On part des origines (Comment est née la langue italienne ?), puis on aborde six parcours consacrés à la norme (Qui a établi les règles de l’italien ?), à l’écriture (Comment l’italien écrit s’est-il transmis ?) et à l’oralité (Comment l’italien parlé s’est-il diffusé ?), à la langue populaire (Comment résonne l’italien de ceux qui ne le connaissent pas ?), au rapport avec les dialectes (Quelles langues parle-t-on en Italie ?) et au rapport avec le reste du monde (Comment la langue italienne s’est-elle répandue dans le monde ?). Photographies et dessins, cartes et vidéos, manuscrits et bandes dessinées, jeux et animations. Le récit se poursuit – entre curiosité et approfondissement – en croisant les domaines pour lesquels l’italien est le plus connu dans le monde : l’art et la musique, la littérature et le cinéma, la mode et la cuisine. De A comme Alighieri à Z comme Zerocalcare.

 

 

Vous êtes-vous inspiré de modèles étrangers déjà en place pour élaborer ce projet ? Existe-t-il des expériences similaires dans d’autres pays ?

 

Le travail d’élaboration de ce projet, qui a duré deux ans, est reconstitué dans un volume publié par la maison d’édition Il Mulino et disponible en ligne en accès libre : Verso il museo multimediale della lingua italiana. Riflessioni, esperienze, linguaggi (https://www.darwinbooks.it/doi/10.978.8815/410283). Le volume témoigne, à travers une série de contributions spécifiques, du parcours que le Multi a suivi depuis sa conception jusqu’à sa réalisation. La première phase de la recherche s’est principalement concentrée sur l’aspect théorique lié à la muséalisation d’un patrimoine culturel immatériel tel que la langue dans un contexte virtuel comme celui du réseau. Il s’agissait donc d’étudier les musées de la langue ou des langues déjà existants, de recenser les ressources en ligne utiles pour ce type de projet et surtout d’envisager les différentes possibilités d’aménagement de l’exposition. C’est-à-dire des aspects tels que l’identification des objectifs de diffusion des connaissances et du public cible ; la sélection des contenus à privilégier parce qu’ils sont les plus adaptés à cet objectif ; le choix des techniques de narration et d’exposition multimédia les plus efficaces. La deuxième phase a été consacrée à la construction concrète d’un musée multimédia qui pourrait représenter l’application pratique de cette réflexion théorique, en impliquant des visiteurs et des visiteuses du monde entier dans une expérience immersive fascinante.

Le parcours du Multi s’inscrit dans le cadre d’un projet beaucoup plus long qui a déjà fait et continuera de faire l’idée d’un grand musée de la langue italienne. En particulier, il est né de l’expérience de l’exposition Dove il sì suona. Les Italiens et leur langue (Florence, Galerie des Offices, 13 mars 2003 – 6 janvier 2004) et de la comparaison avec des musées internationaux tels que le Planet Word (Washington, DC : https://planetwordmuseum.org/) ou le nouveau Museu da Língua Portuguesa (São Paulo, Brésil : https://www.museudalinguaportuguesa.org.br/), et est parallèle et contigu au grand projet du Musée national de l’italien (MUNDI : https://cultura.comune.fi.it/mundi) qui, voulu par le ministère de la Culture, a déjà offert au public un aperçu en été 2022. Entre-temps, les travaux de rénovation de son magnifique siège dans le complexe de Santa Maria Novella à Florence se sont poursuivis et, en même temps, la définition du projet scientifique a également avancé, confiée à un groupe de travail composé de représentants de l’Accademia della Crusca et de l’Accademia dei Lincei, de l’Associazione per la Storia della lingua italiana, de la Società Dante Alighieri et de l’Enciclopedia Treccani. L’aménagement architectural, conçu autour de documents de différents types, est également en voie d’achèvement : des pièces d’archives et des livres, bien sûr, mais aussi des objets d’art et d’usage courant, des reproductions en 3D, des postes multimédias et des cartes interactives. Il est prévu d’ouvrir au public les 18 salles du MUNDI d’ici 2025.

Par rapport à tous ces musées de la langue, le Multi présente une particularité qui représente une nouveauté même au niveau international. Il s’agit en effet de ce que l’on peut définir comme un musée « nativement numérique ». Il ne s’agit pas d’une restitution ou d’une traduction numérique d’un musée physique préexistant, mais d’un musée expressément conçu et réalisé pour une utilisation exclusivement numérique.

 

 

À quel type d’utilisateur s’adresse le Multi ? Des possibilités d’interaction entre le public et le musée sont-elles prévues ?

 

Le Multi est un musée virtuel qui vise à valoriser le patrimoine immatériel varié de l’histoire de la langue italienne grâce à une utilisation des contenus technologiquement avancée, inclusive et interactive, s’adressant également aux non-spécialistes et aux non-italophones. Grâce à une interface intuitive et à une structure facile à naviguer, le Multi s’adresse à un public vaste et hétérogène. Ses parcours numériques combinent des récits, des images, des vidéos et des sons pour concilier la rigueur scientifique de la reconstruction avec une expérience immersive et surprenante. Le Multi est inclusif, interactif, gratuit et, grâce à sa version en anglais, il s’adresse également à un public international.

La narration des différentes histoires de la langue italienne est organisée dans le Multi selon la logique du scrollytelling : c’est précisément grâce au mécanisme du défilement que les objets numériques au centre du récit se rencontrent. Images, animations graphiques, reproductions numériques de documents et de manuscrits en haute qualité, extraits vidéo, enregistrements vocaux, musiques, cartes interactives constituent les pièces du musée, c’est-à-dire les éléments qui forment la collection du musée. Les pièces sont intégrées dans le récit des parcours, mais peuvent être récupérées dans la collection du musée : ici, les reproductions de manuscrits, les films audiovisuels ou les œuvres d’art, accompagnés de légendes avec toutes les données techniques, se combinent en de nouvelles géométries significatives, entre rapprochements et sauts temporels. L’implication du public se fait également à travers les activités ludiques présentes dans chaque salle.

 

 

Comment se traduira concrètement la collaboration entre le Multi et newitalianbooks ?

 

Elle consistera en une série de contributions publiées sur ce site et consacrées à chaque fois à un aspect spécifique de la langue italienne et de son histoire : la musique, la nourriture, l’art, le sport, etc. En tant que directeur du Multi, je suis très heureux de cette collaboration et j’espère qu’elle aidera notre musée multimédia à atteindre les très nombreuses personnes qui, dans le monde entier, étudient, enseignent ou même aiment simplement la langue italienne.

 

Entretien avec Giuseppe Antonelli,  directeur du Multi (Musée multimédia de la langue italienne)
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