La forma dell’acqua

La forme de l’eau est le premier roman mettant en scène le commissaire Montalbano de Vigàta. Camilleri l’écrit en 1994 et représente une véritable nouveauté, non seulement et pas tant pour son langage inventif, que pour la construction du personnage principal. Michele Serra écrivait en 2014 : « Dans sa première apparition dans le monde de la page écrite, Salvo Montalbano n’est pas là. Ou plutôt, il est là, mais il n’est pas parmi nous. Il est avec lui-même. Il dort. Et il rêve. Pas un rêve ordinaire, d’ailleurs : un rêve érotique, une étreinte animée avec sa Livia, proche/lointaine. Il est brusquement interrompu par un appel téléphonique du brigadier Fazio. Un homme est mort, une nouvelle affaire est ouverte. Arraché à lui-même, jeté hors du lit, interrompu dans l’extase psychique la plus intense et la plus intime, le commissaire jure en essayant d’attraper « non pas tant le combiné que les lambeaux flottants du rêve qui s’évanouissait inexorablement ». C’est la métaphore implacable d’un accouchement. Un appel soudain et traumatisant au monde. D’un ventre protecteur – le sommeil, la femme, l’étreinte – à son devoir d’être. Ces lambeaux ne peuvent plus être recousus, ce rêve est interrompu à jamais. À partir de ce moment, Salvo Montalbano nous appartient : il a été livré par son auteur aux lecteurs et aux spectateurs. Un roman qui était comme une révolution, et Montalbano, avec sa figure, allait réaliser la fusion tant convoitée entre popularité et littérature.