Entretien avec Irene Pepiciello (Agenzia Viva)
Auteur: Federica Malinverno
Irene Pepiciello est née à Rome. Diplômée en langues, après plusieurs expériences d’études et de travail à l’étranger, elle a acquis vingt ans d’expérience en tant que responsable des droits et traductrice dans diverses maisons d’édition, avant de devenir agente en 2017. Début 2025, elle fonde avec Chiara Melloni l’agence littéraire Viva.
Comment avez-vous décidé de fonder Viva Agenzia ?
Nous étions arrivées à un moment où nous souhaitions non seulement être autonomes sur le plan opérationnel, mais aussi sur le plan décisionnel. Chiara [Melloni, les deux fondatrices de l’agence] et moi-même avons plus de vingt ans d’expérience dans le secteur et nous étions prêtes à voler de nos propres ailes. Au fil de nos nombreuses années de travail, nous avons en effet développé des goûts, des inclinations et des préférences dans différents domaines.
Comment l’agence est-elle structurée ?
L’agence, c’est Chiara et moi, nous faisons appel à un réseau fiable et précieux de sous-agents pour gérer les droits de traduction de nos livres à l’étranger, à quelques lecteurs pour l’évaluation des manuscrits et à un consultant pour l’audiovisuel, car en plus de gérer les droits de traduction des livres de nos auteurs, nous nous occupons également des droits audiovisuels. Chiara et moi supervisons tout et sommes en contact direct, car nous aimons échanger nos points de vue sur les choix managériaux, financiers et de projet. De plus, cela est nécessaire car nous avons deux personnalités différentes, même si nos goûts sont très similaires, et échanger nos points de vue est toujours enrichissant. Nous sommes associées fondatrices, nous gardons donc toutes les deux un œil sur tout.
Vous avez parlé de goûts, de penchants, de préférences… Comment cela se traduit-il au niveau du catalogue et des choix des auteurs ?
Nous sommes ouvertes à tous les genres. Parmi les auteurs que nous représentons, il y a des personnalités très hétérogènes, l’offre est très riche. Ce qui nous unit, c’est que nous avons besoin de travailler sur des projets auxquels nous croyons : il n’y a pas un titre ou un auteur qui ne nous convainque pas. D’ailleurs, c’est précisément la possibilité de créer une nouvelle réalité qui nous a permis de faire ce type de choix. Cela va de l’essayiste à la romancière, en passant par l’auteure de romans graphiques, sans autre fil conducteur que notre goût. En effet, il est fondamental pour nous de nous occuper de la qualité et de la promouvoir, et nous espérons que cela se traduira en termes de ventes, de prestige et de reconnaissance pour les auteurs. Une autre condition importante pour nous est que la relation avec les auteurs soit basée sur une confiance totale, de part et d’autre : nous devons pouvoir nous mettre au diapason des auteurs et autrices de manière claire et sereine.
Pensez-vous qu’il y ait une limite au nombre d’auteurs ou de projets qu’une structure de votre taille peut suivre ?
Il serait prématuré de nous fixer une limite. Étant à nos débuts, nous avons pu remettre les compteurs à zéro, organiser les premiers salons, trouver des consultants, mettre les rouages en marche… à notre manière. Il y a toujours de la place pour les bons auteurs et autrices.
Quels sont les premiers auteurs et projets que vous avez vendus à l’étranger en tant que Viva Agenzia ?
Notre première vente en tant que Viva Agenzia a été un texte de backlist. À sa sortie, il n’avait pas suscité d’intérêt particulier, mais quelques mois plus tard, il a été vendu, ce qui confirme que l’actualité n’est pas toujours une condition nécessaire à la vente : certains titres peuvent fonctionner même des mois et des années après leur première publication en Italie. Le nouveau roman de Letizia Pezzali, Un animale innocente (Einaudi Stile Libero, 2025), a également suscité un vif intérêt : les droits de traduction ont été vendus dans certains territoires et nous recevons des avis positifs pour une éventuelle adaptation audiovisuelle, car c’est un livre qui a une dimension très internationale.
Est-il si difficile pour un texte italien d’être traduit en anglais ? Lorsque cela se produit, cette traduction ouvre-t-elle des portes ?
Oui, c’est difficile à obtenir et oui, lorsque cela se produit, cela ouvre des portes. Bien sûr, il existe une limite, les éditeurs anglo-saxons attendent souvent que le livre réalise des ventes, remporte des prix… En somme, il faut une base très solide pour susciter l’intérêt. La vente des droits en anglais est généralement envisageable après avoir posé des bases concrètes en Europe.
Que représentent les traducteurs pour vous ?
Les traducteurs sont pour nous une ressource irremplaçable. Ils sont souvent les premiers à être informés des appels d’offres et des financements, et ils agissent aussi un peu comme des promoteurs, des scouts. Leur travail comprend des tâches diverses et ils deviennent souvent eux-mêmes les sponsors des livres qu’ils veulent traduire. Bien sûr, il y a maintenant la question de l’intelligence artificielle, mais il y a tout un côté obscur que le lecteur ne connaît pas et que nous, les professionnels, comprenons un peu mieux. À mon avis, il n’est pas possible de reproduire avec une machine les idées et les intuitions qu’un être humain peut avoir lorsqu’il se confronte à un roman, ni de reproduire les liens qu’un traducteur peut établir avec un éditeur étranger qui pourrait aimer cette œuvre. Alors vive les traducteurs et vive le travail qu’ils font !