Entretien avec Anne Michel, responsable du domaine étranger aux éditions Albin Michel
Auteur: Paolo Grossi
Titulaire d’une maîtrise de littérature comparée (Sorbonne-Paris IV) et d’un PhD de littérature comparée (CUNY, New York), Anne Michel a travaillé chez Albin Michel, Calmann-Lévy et Presses de la Cité avant de diriger, depuis 2009, le département de littérature étrangère des éditions Albin Michel.
Les éditions Albin Michel sont aujourd’hui parmi les plus actives en France dans la traduction de titres italiens. Comment la maison d’édition a-t-elle évolué dans ce domaine ces dernières années?
Cette évolution tient d’abord à une rencontre, celle avec la formidable scout Cristina de Stefano, qui nous a permis de trouver notre place, et nos livres de prédilection, au sein de la très prolifique édition italienne. Quelques beaux succès – La Goûteuse de Hitler par Rosella Postorino, Le Train des enfants de Viola Ardone ou la Saga dei Florio – nous ont convaincu qu’il y avait un profond intérêt français pour la littérature italienne et nous avons bien l’intention de continuer à développer cette liste car l’offre éditoriale est de plus en plus riche et passionnante.
Dans les dernières années, quelles évolutions et quelles tendances avez-vous observées dans les titres proposés par l’édition italienne ? Et dans celle achetée en France ?
Il est toujours difficile de parler en généralité, et l’édition italienne reste tout aussi variée que la française. On peut néanmoins constater que l’extraordinaire succès de la saga des Florios a marqué un regain de la grande saga historique en Italie et nous recevons beaucoup de manuscrits en ce sens. Nous avons ainsi acquis les droits de deux romans d’exception : Al di qua del fiume d’Alessandra Selmi, que Nord vient de publier, et ceux de Il ladro di quaderni de Gianni Solla que publiera Einaudi.
Quels sont vos projets pour l’avenir immédiat, notamment en vue de la prochaine édition du Festival du livre de Paris, où l’Italie sera l’invité d’honneur ?
Nous avons, comme beaucoup d’éditeurs français, prévu une grande année italienne en vue de la prochaine édition du Festival du livre de Paris. En janvier, nous publierons Borgo Sud de Donatella Di Pietrantonio, à mon sens une des plus grandes auteures italiennes aujourd’hui. Borgo Sud est la seconde partie de La Revenue, magnifique roman qui avait obtenu le prix Campiello. En février, nous sortirons Les Démons de Berlin de Fabiano Massimi, la suite de L’Ange de Munich, un polar historique qui a été extrêmement bien accueilli en France et a reçu cette année le prix du meilleur policier du Livre de poche. En mars, nous espérons bien faire l’événement en publiant La Malnata, un premier roman d’une jeune autrice, Beatrice Salvioni, l’histoire d’une amitié entre deux jeunes filles très différentes en 1936 pendant la montée du fascisme. Son éditeur italien, Einaudi Stile Libero, le juge tellement exceptionnel qu’il a organisé une sortie mondiale pour ce premier roman, ce qui, je crois, n’a jamais été fait. Enfin, en avril, nous publierons Immersion d’Emiliano Poddi, un roman étonnant où l’on découvre une Leni Riefenstahl centenaire qui s’est initiée à la plongée pour réaliser des documentaires sous-marins, et plonge en compagnie d’une jeune femme qui cherche depuis longtemps à la rencontrer pour lui demander des comptes. Nous espérons que tous ces auteurs trouveront leur juste place au Festival du livre.
Les éditions Albin Michel ont-elles déjà bénéficié des aides à la traduction allouées par les institutions publiques italiennes ? Je fais référence à la fois aux subventions accordées par le ministère des Affaires étrangères, par le biais du réseau des Ambassades et des Instituts culturels, et au nouveau dispositif du Cepell (Centre pour le livre et la lecture).
Nous avons eu la chance de recevoir des subventions du Cepell pour Borgo Sud de Donatella Di Pietrantonio et pour Les Démons de Berlin de Fabiano Massimi, ainsi qu’une aide du ministère des Affaires étrangères pour La Foglia di fico d’Antonio Pascale que nous publierons en septembre 2023.