La bella estate de Cesare Pavese au cinéma

La bella estate de Cesare Pavese au cinéma

par Laura Pugno

La réalisatrice Laura Luchetti, déjà auteure de Fiore Gemello, a participé au festival Cinéma Made in Italy (11-14 juin, Grand Teatret) organisé par l’Institut culturel italien à Copenhague en juin dernier. Elle porte aujourd’hui à l’écran, pour Kino productions, le court roman La bella estate de Cesare Pavese, un classique de la littérature italienne du XXe siècle. Elle répond à nos questions pour italiana.esteri.it et newitalianbooks.

Comment est née l’idée d’adapter La bella estate de Cesare Pavese et comment s’est déroulée la transposition du livre au film ?

J’avais récemment lu La bella estate et, par une incroyable coïncidence, peu de temps après, les producteurs m’ont annoncé qu’ils avaient acheté les droits de cette magnifique histoire de passage à l’âge adulte et m’ont demandé si j’étais intéressée à en faire une adaptation… La nouvelle de Pavese, si difficile à transposer au cinéma parce qu’elle a une intrigue presque inexistante, mais une grande atmosphère sensuelle et évocatrice, représentait un énorme défi. Ce que contient cette nouvelle, cependant, c’est un récit universel, applicable en tout lieu et à toute époque. L’histoire d’une jeune femme qui devient adulte, apprend à s’accepter elle-même et sa sexualité. Un de mes thèmes préférés. Comment refuser ? Avec amour et terreur j’ai commencé la transposition, en respectant cet auteur magnifique et avec l’intention de laisser intacts les thèmes qu’il a traités, mais en les traduisant dans un récit cinématographique et en rapprochant le plus possible ces années 1930 qu’il a racontées d’un langage contemporain. Il était important pour moi de laisser le cadre historique, afin qu’il ne devienne pas un récit sur un sujet très débattu aujourd’hui (ce qui lui aurait fait perdre de sa force), mais le récit d’un thème universel. Aujourd’hui comme hier. Le thème du choix amoureux, du qui et du comment, débattu avec véhémence par nos jeunes d’aujourd’hui, était présent auprès des générations passées. En bref, il a toujours été là. Il était essentiel pour moi d’insister sur ce point dans mon approche de l’histoire.

À travers Pavese, que nous dit ce film sur les sensibilités contemporaines et comment l’histoire racontée dans La bella estate nous touche-t-elle encore aujourd’hui ?

Cette histoire nous touche aujourd’hui par sa capacité à raconter la nature humaine qui change peu malgré les époques. C’est un récit sur le passage à l’âge adulte. Il raconte le courage d’être soi-même et le fait d’un point de vue féminin.  C’est un regard sur le désir féminin si peu raconté, c’est la palpitation d’une jeune femme qui tombe amoureuse d’une autre femme et qui finalement s’accepte malgré les pressions sociales et la culture qui lui disent de faire le contraire. C’est un magnifique conte sur la liberté, la plus grande selon moi, celle d’aimer qui l’on veut et comme on veut.

Le film a été présenté en avant-première au festival du film de Locarno le 4 août. Quel sera son parcours international et comment cette opération artistique contribuera-t-elle à mieux faire connaître l’œuvre de Cesare Pavese au public étranger ?

Le film a fait une entrée merveilleuse sur la Piazza Grande du Festival de Locarno, qui accueille le plus grand nombre de spectateurs en Europe, soit environ huit mille personnes. Une grande émotion. Les pas du film commencent maintenant à bouger, et il a déjà été vendu dans de nombreux pays, dont l’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Russie, la Suisse… Il a reçu des invitations de festivals internationaux, que nous ne pouvons pas encore révéler, hélas, mais qui laissent présager un voyage international que nous espérons… Pavese n’a certainement pas besoin de mon film pour être connu à l’étranger, mais le fait d’avoir vu tant de jeunes se présenter aux projections avec un exemplaire tout neuf du roman à dédicacer, m’a fait sourire et espérer que, surtout en ce qui concerne les plus jeunes, si le film leur donne envie de lire un classique, alors avec ce travail nous avons fait beaucoup plus que ce que nous pouvions espérer…..