Quindici mesi

(…) pour de nombreux jeunes, cette période, qui a été sans doute accueillie et vécue en bougonnant et en râlant, a représenté un moment particulier de leur croissance. Une sorte de tournant existentiel, la fin de la période de l’adolescence et le passage à la vie adulte.
Edi Fabris, à travers sa verve littéraire intarissable, nous offre dans cette nouvelle œuvre un regard sur la vie militaire d’une recrue. Non pas le service militaire banal de tant de ses pairs déplacés ailleurs, mais l’expérience du soldat alpin, un passage naturel et presque indispensable pour les jeunes Frioulans.
Quinze mois de vie vécue, racontés avec la rigueur pointilleuse d’un reporter pur-sang, un itinéraire évocateur parmi les nombreuses casernes alpines de la région, dont certaines sont aujourd’hui désaffectées. Une multitude de connaissances et d’amitiés personnelles, les problèmes liés à une discipline stricte et à l’obéissance, sa langue bien pendue qui le pénalise. Les petites conquêtes personnelles à la recherche de solutions avantageuses, se planquer à l’intendance, se voir confier des services convoités en dehors de la caserne au lieu de l’entraînement formel et ennuyeux.
La manière dont Fabris a conçu son œuvre est singulière : il a le scrupule de ne pas céder à une forme d’autocélébration subjective, et nous avertit, entre les lignes, qu’il n’a pas voulu écrire son autobiographie. De temps en temps, presque en passant, il identifie le moi du narrateur avec un certain Ortolan, qui est, par la suite, arrivé au bout de son service militaire avec un double chevron de caporal-chef. Cependant, le registre personnel est clair, après tout, il serait difficile de concevoir une histoire aussi précise et riche en détails subjectifs si elle n’avait pas été vécue et métabolisée à la première personne. (…)
(Extrait de la préface de Bruno Pizzul)