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13 février 2024

Éditeurs italiens à l’étranger
L’orma à Paris
Entretien avec Lorenzo Flabbi

Auteur:
Paolo Grossi

Lorenzo Flabbi, critique littéraire, est le fondateur, avec Marco Federici Solari, de la maison d’édition L’orma. Il a enseigné la littérature comparée aux universités de Paris III et de Limoges, se consacrant en particulier aux aspects théoriques de la traduction. Il a traduit, entre autres, Apollinaire, Rushdie, Valéry, Rimbaud, Stendhal et Gracq. Il a obtenu des prix prestigieux pour ses traductions d’Annie Ernaux, notamment le prix Stendhal et le prix La Lettura – Corriere della Sera pour la meilleure traduction de l’année 2018.

 

 

  1. En 2020, la maison d’édition L’orma a ouvert son propre bureau à Paris et a commencé à publier des titres en français. Pourquoi cette initiative et avec quels objectifs ?

 

Depuis sa fondation en 2012, L’orma editore est né sous le signe d’une forte vocation européenne. L’idée d’une maison d’édition qui amènerait en Italie les voix les plus intéressantes et les plus cruciales de la littérature francophone et germanophone nous est venue alors que nous vivions à Berlin au début des années 1910. À l’époque, entourés d’un cosmopolitisme endémique pour ainsi dire, nous avons immédiatement pensé à une réalité multinationale, sachant que le premier pas devait être un laboratoire culturel travaillant avec l’instrument de notre langue maternelle, l’italien. Une fois l’expérience collective de L’orma editore plus que solidement établie, il était donc naturel de porter cette aventure au-delà des Alpes. Nous avons décidé d’entrer sur le marché français de l’édition en exportant et en traduisant l’une de nos collections italiennes les plus emblématiques et les plus réussies. Il s’agit de « I Pacchetti », des volumes de petit format qui peuvent être envoyés par la poste grâce à une jaquette qui ferme l’enveloppe. La collection contient des sélections d’épistolaires de grandes figures culturelles, des classiques à redécouvrir à travers leurs écrits privés. Lorsque cette idée a dépassé les 100000 exemplaires vendus en Italie, nous avons compris que le moment était venu de nous lancer dans l’aventure française. Au « Plis » – nom français de la collection – a succédé récemment « Plurabelle », un hommage à cette « pluralité de la beauté » qui vibre à travers les frontières floues et poreuses de notre continent. Nous publions ici, précisément, de la littérature européenne sans barrière de langue ou de nationalité.

L’objectif principal est de continuer à contribuer à la république laïque des lettres qui est le gouvernement raisonné et démocratique des vies, des esprits et des corps sous lequel nous aimons vivre.

 

 

  1. Quel premier bilan, provisoire, pouvez-vous faire, quelque trois ans après la création du bureau de Paris ?

 

Le premier bilan est certainement très positif, malgré le fait que le lancement de la maison d’édition française se soit déroulé dans les pires conditions. En effet, la sortie des six premiers titres, prévue longtemps à l’avance pour le 19 mars 2020, a coïncidé avec le début du confinement en France. Dans les librairies qui venaient d’être fermées, nos « Plis » attendaient en vain des lecteurs à domicile. Mais au bout de quelques mois, une solide campagne institutionnelle de soutien aux libraires a permis d’enregistrer des ventes record dont nos livres ont également profité. En trois ans, nous avons publié 37 titres épistolaires avec un tel écho que nous avons rapidement atteint et dépassé les résultats italiens. Comme je l’ai dit, il y a quelques mois, nous avons également commencé à publier de la fiction européenne, mais le calendrier de cette nouvelle initiative est encore trop récent pour que nous puissions avoir une vision prospective.

 

 

  1. Quel est l’espace consacré aux titres d’auteurs italiens dans le catalogue des Éditions L’orma à Paris ?

 

Avec les « Plis », nous proposons des traductions nouvelles ou inédites de la correspondance de grands auteurs et penseurs italiens comme Leopardi, Montessori, Gramsci et d’autres ; mais c’est dans la nouvelle « Plurabelle » que nous entendons nous proposer comme médiateurs de voix nouvelles ou méconnues de la littérature italienne. Ce n’est pas un hasard si nous avons inauguré la série avec la traduction du roman Notturno di Gibilterra, de Gennaro Serio, lauréat du prix Calvino 2019. Fidèles à l’idée de créer des réseaux et des connexions entre les intellectuels européens, nous avons accompagné l’édition française d’une postface du grand écrivain espagnol Enrique Vila-Matas, qui est également l’un des personnages principaux du livre de Serio. La dernière parution est plutôt un repêchage, Il cappello del prete d’Emilio De Marchi, le premier roman policier de la littérature italienne, défini par Giovanni Raboni comme « un noir à la Simenon, écrit six ans avant la naissance de Simenon », un livre dont personne en France n’avait encore entendu parler.

 

 

  1. Quels projets envisagez-vous, à court ou à long terme, pour consolider cette projection vers l’international ?

 

Dans un avenir proche, nous souhaitons que le parcours de la maison d’édition française se rapproche le plus possible de celui de sa grande sœur italienne. Tout en continuant à miser sur « Les Plis » comme tête de pont dans les librairies de France, nous envisageons d’élargir l’offre de « Plurabelle » avec des auteurs d’horizons différents – peut-être même quelques stars italiennes –, sans exclure la possibilité de publier également des œuvres d’écrivains français qui nous confient leur vision du monde et en particulier de l’Europe.

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